sheon a écrit:Et donc, il se passe quoi ? Tu te mets à teaser, toi aussi ?
Les faits : juin 1984, McEnroe est invaincu ! 42 matchs en 1984, aucune défaite. N°1 mondial, il arrive en finale en ayant perdu qu'un seul set en 1/8e contre José Higueras. Il a pulvérisé Arias et Connors.
Lendl est n°2. Il n'a jamais gagné de tournoi du grand chelem. 4 défaites. On l'accuse d'être une poule mouillée, de balancer quand il sent que la défaite arrive. D'autres disent que c'est un gars de l'est qui fait un blocage. Il a commencé à faire un travail sur lui à ce moment là.
Sur ce tournoi, il lache un set à Gomez en 1/4 et tape Wilander en 3 sets en demie.
Jour de la finale : McEnroe survole le match. 6/3 6/2 en 1h05. Et puis... et puis Lendl gagne le 3e set 6/4. Puis 7/5. Et encore 7/5. En 4h d'un match exceptionnel, tant au niveau de la qualité du jeu que de l'émotion. 1h pour 2 sets. 3h pour les 3 derniers...
Que s'est-il passé pour que ce retournement ait lieu ?
Début de la légende : au 3e set, McEnroe menait 4-2, balle de 5-2... sa balle prend la bande pour qq cm. Noah dit : ça s'est joué à un point, à 3cm.
Et puis il y a cet incident avec un preneur de son de NBC. Le clicquetis des photographes l’énerve. Patrice Dominguez : "ça a brisé sa magie..."
Génie romantique de l'acte manqué : non ce n'est pas Lendl qui a gagné, c'est McEnroe qui a perdu. Il est passé si près... ses fans ne s'en remettent pas.
Débunckage de Benjamin Rassat : mais qui a vraiment revu le match ? McEnroe n'a jamais eu de balle de break dans le 3e, ni même mené au score.
Rassat s'appuie sur l'analyse de Pierre Barthez, qui était au bord du court : McEnroe n'a pas joué le double cette année là, il a souvent fait ses matchs en fin de journée, il faisait frais. Or le jour de la finale, il est 14h et il fait très chaud ce dimanche là. Il casse physiquement. Au bout de 2 sets, il est à l'agonie. Sa chemise est trempée, il prend du temps entre les points alors qu'il ne prenait jamais de temps. Sa 1ère ne passe plus, donc il monte sur 2e, volée difficile, et passing de Lendl.
Jacques Dorfman, arbitre : on a beaucoup dit que le retournement était le problème avec le photographe. J'avoue que personnellement, ça m'a échappé...
Et je regarde le match, enfin.
En effet, McEnroe ne mène jamais dans le 3e. Oui il commence à être rouge et prend du temps. oui son % de 1ere balle baisse. Lendl mène 4/2. Mac remonte 4/4 (donc il fait bien un break quand même, enfin un debreak). Il y a même 40/40 sur le service de Lendl. Mais finalement, le tchèque prend le set. Noah, Leconte, Vilas et leur légende du break d'avance dans le 3e sont rhabillés !
4e set : Mac mène. 4/2. A 4/3, il sert. balle de 5/3 à 40/30 ! Le souvenir de Leconte n'est donc pas du 3e mais du 4e set ! Tout à coup le débunkage génial me parait moins exceptionnel. Leconte se trompait juste d'un set ! A ce moment là, contrairement à ce que m'avait dit Rassat quand je l'ai vu, il est aussi proche qu'Edberg en 1989 : un point et un jeu.
Et cette balle de 40/30, Mac la sort de 10cm. Ce n'est pas cette image du passing raté pour 3cm. Tous les montages qui sont fait, y compris par Rassat, ce ne sont pas les points que l'on croit... (Il nous montre un Mac rouge et trempé. Oui. Mais au 4e il est bien mieux !)
A 5/5, 0/30. Et là encore, Lendl joue très bien et remonte ! Les deux jouent très bien. Mais Lendl joue fort et bien mieux que les deux premiers sets. Ca reste serré. Il n'y a pas d'effondrement physique de Mac. Il est là. On ne fait pas 7/5 7/5 contre ce Lendl là en étant à l'agonie !
Ce que fait Mac, avec sa prise unique, c'est tout simplement génial. Il ne conteste plus l'arbitrage à partir du 3e. Il veut ce match. Mais Lendl est mieux physiquement, frappe fort, il ne vole pas sa victoire. Il balance des mines en coup droit comme en revers sur des services de Mac qui cherche à le déporter. C'était un match exceptionnel. C'est vrai, la baisse de 1ère de Mac est étrange car dans l'échange, il est là.
Donc en conclusion, Non McEnroe n'a pas perdu en ayant eu des balles de match ! Il a été à 5 points, comme Edberg.
Mais non il ne s'effondre pas. Il baisse de régime à mesure que Lendl augmente le sien. Et ça s'équilibre. Et Lendl regarde Mac, il voit bien qu'il n'est plus aussi frais. Alors il applique la fameuse tactique de l'usure : jouer 2-3-4 coups de plus par échange. Parfois Mac s'embarque dans ces points là, des fois il arrive à couper court. Il sort encore des volées hors du monde au dernier jeu, mais rate la plus facile sur la balle de match. D'où le célèbre commentaire d'Hervé Duthu. Mais oui, cette partie est monumentale...
Mac ne connaitra que deux autres défaites en 1984 : à Cincinnati et en Coupe Davis. Pour 82 victoires. soit 96,47%. Record non battu, même par les trois cinglés d'aujourd'hui.
A Wimbledon il massacre Connors 61 61 62. Et Lendl à Flushing 6/3 6/4 6/1.
Seulement ce con explose des bouteilles et insulte l'arbitre à Stockholm en novembre et est suspendu 21 jours : il ne pourra pas jouer l'Australie en décembre et faire au moins le petit chelem...(il y serait aller, il l'a fait en 83 et 85) mais en janvier 85, il remporte le masters 84 en battant Lendl 75 60 64.