Hugues a écrit:Marlaga a écrit:Hugues a écrit:Et pirater en fait c'est donc se priver à long terme de l'édition HD de chef d'oeuvres, car ils ne se concentreront que sur ce qui est rentable
Ta phrase n'est valable que si le piratage remplace un achat de la même oeuvre, ce qui, en pratique, est très loin de la réalité. C'est ça que les maisons de disques et les studios de cinéma n'ont toujours pas compris. Un film peut être très piraté tout en étant très acheté en DVD (Bienvenue chez les chtis par exemple comme on en parlait à l'instant, record des téléchargement et record des ventes de DVD dans la foulée) ou l'inverse, peu piraté et peu vendu. Et rien ne prouve qu'un film très piraté aurait vendu plus de DVD sans le piratage. Il semblerait même que plus un film est piraté, plus il est vendu en DVD car ça fonctionne comme de la publicité.
Les studios de cinéma devraient aussi comprendre que l'émerveillement devant la qualité et l'objet du DVD est passé, comme l'industrie musicale doit comprendre que l'objet du CD audio ne fait plus rêver. La baisse des ventes est mécanique et en période de crise, elle est logique. Aux premières années des DVDs, beaucoup de gens trouvaient génial d'avoir une collection de DVDs. Avec un peu de recul, on se demande quel intérêt ça a. On ne regarde pas un film 50 fois, ça prend de la place, les bonus sont inintéressants, la qualité est égalée ou surpassée par d'autres formats et même la TV avec la TNT HD propose des diffusions multilingues avec une image de qualité. Le support physique n'apporte plus grand chose.
Quant aux éditions de chef d'oeuvre, je crois qu'aucun studio n'est assez philanthrope pour investir en pure perte les bénéfices d'un film à grande diffusion dans l'édition d'un petit film. S'il est édité, c'est pour se vendre et s'il ne se vend pas assez, ils n'en éditeront pas d'autres. Donc achète ton film culte si tu veux que ça continue.
Cette année, j'ai été plongé dans l'absolu dégout de constater que même de vraies et singulièresoeuvres, dont le montage financier avait été difficile à boucler, et qui seront vues comme aussi précieux sans doute à la postérité que l'est à nos yeux
La Passion de Jeanne d'Arc de Dreyer avec l'incarnation éternelle de Renée Falconetti, qui d'avance se seraient peu vendues car méconnues,sont ripées par des boutonneux.. Et pire encore, téléchargées par des gens qui visiblement n'y entendaient que dalle, à lire leur commentaires de cinéphages (c'est péjoratif à mes yeux) drogué au clignottement de couleurs..
Que veux-je dire par là, je veux réfuter ton argument favori, ça n'a pas de conséquence le piratage, le film n'aurait pas été acheté, ou bien, les films téléchargés sont achetés.. Je suis désolé, mais les études lobbyistes j'ai déjà donné..
Quand le piratage n'existait pas.. Pour découvrir un film tu allais le louer, il te coutait quelques euros, pour ce prêt de 24h.. Comme il te coutait un peu d'argent et comme justement ces moments de découverte étaiten plus rare qu'en ces périodes de toute gratuité, tu le regardais non comme un consommateur boulimique de films, comme un enfant gaté gavé au blockbuster, noyé sous des centaines de disques gravés, c'est à dire distraitement, mais tu accordais à l'objet artistique un peu de l'attention qu'il méritait, y investissait un peu plus d'obstination si les premières minutes te repoussaient. Tu faisais l'effort d'entrée dans l'oeuvre... Et peut-être alors un film qui ne t'aurait touché si tu l'avais pris comme un simple produit d'abondance, non précieux, tu te surprenais à l'apprécier, pour les qualités qui justement au départ t'avaient effrayé.. Et pour le revoir, parfois, tu te surprenais à vouloir l'acheter. Le piratage, lui, dégrade ce qu'il touche..
L'oeuvre n'a plus de valeur, on la regarde comme un enfant Bettencourt regarde sa 60e Ferrari, comme un jouet sans importance... on la consomme plutôt qu'on ne la regarde en fait...
Je suis sûr que les oeuvres dont j'ai évoqué l'exemple, elles pourraient être appréciées par quelques uns de ces mêmes écervelés, si l'objet avait été précieux à leurs yeux, et le moment plus singulier, plus solennel .. Mais non, dans la profusion de la gratuité c'est "pas cool" de "perdre son temps" devant quelque chose qui demande un peu d'investissement personnel... Là pour ces consommateurs effrinés de gratuité, une oeuvre c'est un bol de cacahuète, un ingrédient pour s'empiffrer l'esprit que l'on jette si il est étrange, il n'a aucune valeur.. Et ce qui n'a de valeur on le gaspille..
Le gaspillage c'est l'absence d'attention. Or une oeuvre pour vivre, elle a besoin d'attention..C'est la société d'abondance, la société de consommation dans une de ses incarnations et silverwitch avait raison, le piratage c'est une des formes du libéralisme..
Le piratage c'est en quelque sorte la carte UGC en pire, cette carte qui permet de consommer du cinéma (et quitter la salle comme un enfant gaté après 5 minutes) plutôt que de le regarder.
Pour revenir à ces films, pourquoi les pirater alors que leur ventes seront faibles [...].
Ces oeuvres rares, pourquoi ne pas leur accorder la chance d'une rencontre précieuse, parce qu'il y aura eu l'acte d'acheter le droit de voir l'objet (location) et éventuellement peut-être l'envie de l'acheter.. Seulement par une pseudo-rébellion qui n'est que le pire des conformismes (après tout ils vont dans le sens de l'idéologie dominante, le libéralisme), basé sur une démagogie pire encore, celle d'inconscients vivant chez Papa Maman affirmant que tout doit être partagé, tout doit être gratuit, au détriment des ayant droits.. (je pense que la sociologie des gens qui téléchargent est variée, mais celle de ceux qui uploadent se limite à des adolescents ou post-adolescents qui ne connaissent pas encore la valeur du travail, parce que c'est cool de mettre en ligne même le travail du plus nécessiteux, on devient célèbre sur la petite
scene, on se fait un ego)
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Alors oui, pour conclure,
le piratage parce qu'il implique un mépris, que l'objet artistique est réduit à un bien de consommation, à un bien d'abondance, interchangeable, jetable à la moindre contrariété ou au moindre pas en dehors de ce qui nous est coutumier, où la tentation du mauvais film concurrence dans la pensée l'investissement nécessaire d'un bon film, du fait de sa gratuité si ça ne plait pas on jette, comme on jetterait de la nourriture dont on a plus envie tue un certain cinéma.. Tu ne veux pas le voir.. Pas voir que tant qu'il y avait un petit droit d'entrée, ça rendait l'objet particulier, digne de s'investir.
Tu sais pourtant en général que le libéralisme affaiblit les identités, lutte pour et vers l'uniformité, la moins couteuse. Ici ça n'est pas différent, une autre incarnation du libéralisme nous emmène aussi vers un cinéma uniforme, où l'intelligence, la singularité se fait rare. Les mêmes conséquences donc, pour des causes soeurs.
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