de Shoemaker le 24 Nov 2020, 17:36
Il n'y a pas de "vérité", il n y a que des rapports de force.
Sans se lancer dans de grands développements sur la nature de l'Etat, des classes sociales, etc, j' en reste donc à cette vision des choses : qui détient la force ? Militaire et policière, bien sur, mais aussi la capacité de mobiliser un nombre de citoyens suffisants pour que l'armée et la police reculent, et ne peuvent tirer dans le tas sauf à provoquer un génocide.
Trump s'agite, mais il n'est pas dans le coup d"Etat : il est tout simplement ENCORE dans la légalité.
Et là, il n'y a donc pas de "vérité", mais il s'agit de savoir, en supposant qu'il ait des intentions "coupables", s'il a la force de transformer ses mots en actes : Il ne le peut pas. L'armée ne le suivra pas. Les foules gigantesques ne descendront pas dans les rues. Mais si cela advenait, oui, alors, ou pourrait parler d'un coup d'Etat DANS LES FAITS. En ce moment, le rapport de force est largement en rapport des Démocrates et des lois constitutionnelles, malgré le vacarme que fait Trump. Donc, les choses, sauf tsunami imprévu, se réguleront tranquillos, dans les jours et les semaines qui arrivent.
Les nombreuses analogies que tu établis, me semblent inopérantes. L'histoire, ce sont systématiquement des situations singulières, en rapport avec la nature précises des conflits en cours. En Algérie, on était dans un fait colonial, extraordinairement spécifique. En Iran, la composante religieuse était prépondérante. Au Vénézuela, on ne peut rien comprendre si on exclu les opérations et techniques de "regime change" dont les USA sont friands. Il y a pourtant un fil conducteur entre tous ces événements, mais du point de vue marxiste : la lutte des classes. En Iran le peuple se soulevait contre une bourgeoisie compradore (c'est l'origine des événements). Au Vénézuela l'impérialisme US essaye de REdonner le pouvoir perdu à la bourgeoisie compradore locale. En Algérie, un sous prolétariat dit "Indigène" luttait pour se débarrasser du pouvoir colonialiste violent que faisait peser la bourgeoisie impérialiste Française. Aux USA lors de la guerre de Sécession, la bourgeoisie du Nord, désirant passer à un mode de production moderne, mécanisé, a anéanti la féodalité du Sud archaïque et esclavagiste, qui retardait l'évolution... Personne n'a "rainson" ni "tort" : si vraiment il doit y avoir une vérité, c'est celle de l'instinct de conservation, porté au niveau des classes sociales : chaque classe lutte pour faire cesser une oppression, une domination, ou pour la maintenir, la perpétuer.
Mais au-delà de ce fil conducteur, chaque situation "locale" est singulière.
Actuellement, aux USA, il y a une crise historique (vu le poids de cette puissance) du système lui-même. La puissance US s'est projetée sur toute la planète, en un long processus impérialiste qui a débuté depuis la fin de la 2eme GM. Ce processus qui a transformé les capitalismes nationaux en un unique capitalisme global, mondial, avec le grand règne des multinationales, des banques, etc etc etc, ce processus donc cause une grave rupture du consensus qui maintenait la cohésion du peuple US (WASP, Afro américains, Latinos, American Way of Life, Constitution, Moteur V8, rock"n roll et tutti frutti à tous les étages...). Le système électoral mis au point par les pères fondateurs, très vicieux, a atteint le bout de sa logique. Le communautarisme, sur lequel s'est basée la société US, avec les WASP en haut, pareillement, a atteint son seuil de compétence. Les Démocrates ont instrumentalisé ce communautarisme jusqu'à la lie, les Red Necks se sont sentis trahis, délaissés par les castes d'en haut qui s'en foutaient plein les fouilles à l'international, en laissant le pays crever, et les minorités mettant en danger le bon vieil équilibre de rêve...
Tout cela et bien d'autres choses (le dollar, l'armement, les guerres, etc etc) a fini par commencer à s'effondrer. C'est cela qui a amené un Trump au pouvoir. Et ailleurs, pour le pire un Bolsanero, un Bibi... et pour le meilleur, un Poutine... Les peuples ont peur, peut-être en France demain une Lepen prendra le pouvoir... etc C'est la tendance, parce que le monde est en pleine convulsion. On quitte un vieux mode de production basé sur le pétrole, les ressources qu'on croyait infinies, les vieilles industries, etc, pour un nouveau mode de production dont on commence à peine à percevoir l'esquise. Cela se passe dans la violence parfois (le Moyen Orient...), le risque de confrontation majeure (OTAN-Russie-Chine), mais toujours dans la peu, dans les convulsions...
Breeeeeeeefffffff !!!!!!
Ce qui se passe aux USA, ce qu'on voit à première vue, ce ne sont que des soubresauts en mode "spectacle". Il faut essayer de voir plus profondément, dans les strates encore cachées... Il faut essayer de repérer les forces telluriques, comme qui dirait.
Pas facile, mais s'il y a une "vérité", c'est là où elle se niche...
"c'est quoi le blues". Toujours les mêmes histoires, celles qui font vaciller les mondes et les empires.
John Lee Hooker