Sylex a écrit:Il y a une gradation dans les utopies.
Philosophiquement, je suis en désaccord, mais bon, je comprends l'idée.
Sylex a écrit:Mon expérience des rapports humains m'amène à croire qu'ils sont influençables, mais aussi profilables. Avec des comportements et des talents divers. Ainsi on a des moteurs, des attentistes, des ambitieux, des généreux, des esthètes, etc. Et je crois qu'on peut vivre heureux en étant subordonné. La subordination n'est pas inhumaine.
Pour un modèle transposable je pense qu'il faut accepter des moindres des maux. Et rechercher des rapports de force équilibrés.
Pourquoi supprimer les liens hiérarchiques ? Le problème n'est pas dans l'existence de liens hiérarchiques au sein de différentes collectivités, mais dans l'ordre qui les décrète. Ce que je conteste, c'est d'abord la relation entre le pouvoir et le capital que l'on tente de dissimuler derrière une propagande naturalisée, ici par exemple avec l'invention de l'entrepreneur entreprenant. Au nom d'une inégalité naturelle entre les Hommes (ou d'une nature différente selon les êtres humains), on défend un système inégal et dont l'inégalité repose sur le capital. Si tu élargis ton exemple à l'idéal démocratique, c'est plus clair: tous les Hommes sont différents, tous ne veulent pas être responsables, mais tous ont une voix. Le principe démocratique réduit: un Homme, une voix. Or ici tu ne défends pas une 'aristocratie (le gouvernement des meilleurs) dans l'entreprise, mais une ploutocratie dans l'entreprise.
Mais revenons en arrière, avant de décider d'une utopie raisonnable ou crédible, encore faut-il voir ce que l'on voit. Je conteste ton point de vue, non qu'il soit déraisonnable mais parce qu'il oublie une partie des enjeux, au profit d'une idée de la lutte des classes trop rapidement digérée. Or les mécanismes à l'oeuvre ne sont pas réductibles à cette vision. L'entreprise est une collectivité humaine (je ne parle même pas encore de la définition de sa fin), c'est à la fois un lieu de travail, d'échange, de sociabilité, mais du point de vue de l'analyse des rapports de force, c'est aussi le théâtre des trois grands facteurs: domination, exploitation, aliénation.
Je ne vois pas comment on pourrait penser le "profit pour tous" sans interroger les trois piliers: le pouvoir dans l'entreprise, la rémunération (au sens large, le partage du profit) et le travail lui-même, en quoi il consiste et les conditions dans lesquelles il est effectué. De ce point de vue, on assiste à un recul critique très important au nom de la fin des idéologies, laissant croire aux individus que l'économie n'est pas le champ d'idéologie, de rapports de force et de pouvoir. C'est tout ça à la fois.